Trois opérations ont été décortiquées au centre de formation départemental lors d’une séquence qui a regroupé près de 80 personnes.
Décortiquer une intervention afin de comprendre ce qui a fonctionné et (surtout) ce qui peut être amélioré. Tel est l’objectif des séminaires Retex organisés par le service Retour d’expérience et dont le cinquième s’est déroulé jeudi 6 juin au centre de formation départemental à Velaux.
Nouvelle formule
« C’est un travail assez soutenu mais de grande qualité, sur lequel l’enjeu est de pouvoir partager, restituer et intégrer ces retours d’expérience dans nos pratiques opérationnelles », a introduit le directeur départemental et chef de Corps des Pompiers13, le colonel Jean-Luc Beccari. « Ça reste des éléments à construire car intégrer un Retex dans un programme pédagogique ou une doctrine et bien le choisir, ce n’est pas forcément évident », a-t-il poursuivi devant une assemblée de 80 personnes, suivant les échanges à la fois en présentiel et en visio-conférence.
Après un point sur l’actualité du service Retex, dont un focus particulier sur les procédures de signalement Retex à destination des centres d’incendie et de secours grâce à des QR codes en cours d’installation dans les différents groupements, le programme de l’après-midi s’est articulé autour de trois interventions. Nouveauté de ce 5e séminaire : chaque retour d’expérience était entrecoupé d’une séquence permettant d’apporter des éléments techniques ou des apports de connaissances en réponse à des problèmes rencontrés sur le terrain.
La posture du COS face à la réalité du terrain
Exemple concret avec le premier Retex portant sur une intervention en date du 13 octobre 2023. Un feu de véhicule léger se propage en fin d’après-midi sur des habitations adjacentes à Fourques, dans le Gard. Le territoire de compétences relève du Sdis 30 mais le secteur de premier appel est bien celui d’un CIS des Bouches-du-Rhône. Au total : une cinquantaine de sapeurs-pompiers et dix engins sont mobilisés pour éteindre cet incendie à l’issue duquel sept personnes vont être relogées. Si la coordination entre les Pompiers13 et leurs homologues du Gard a été l’une des clés de la réussite de cette intervention, trouver le juste milieu dans la balance bénéfices/risques face à la mise en danger d’un binôme pour le sauvetage d’une victime est l’un des axes d’amélioration qui a été retenu dans le cadre du Retex.
C’est en ce sens que Morgane Lacroix, chef du laboratoire Facteurs Humains au centre d’études et de recherches sur la Sécurité civile de l’Ensosp, est intervenue, avec une présentation de ses travaux sur les compétences cognitives mobilisées dans les prises de décision du commandant des opérations de secours. Logique de performance opérationnelle, logique psychosociale, interdépendance du travail du collectif… Tout a été décortiqué avec minutie pour proposer des solutions et permettre au COS de prendre la meilleure décision dans sa gestion des événements une fois sur le terrain. Cela peut passer par la formation, avec par exemple un effet de surprise qui peut être recherché dans le cadre de la préparation opérationnelle afin d’accroître la capacité d’adaptation face à une situation inhabituelle.
À la (re)découverte du Grex
Le deuxième Retex concernait un feu d’appartement au sein d’une habitation collective de la 4e famille (1) à Aubagne, le 8 avril 2023. Ce jour-là, les Pompiers13 sont engagés en fin d’après-midi pour un feu dans une chambre au premier étage d’un immeuble situé dans un quartier populaire de la commune. Là encore, l’interservices entre sapeurs et marins, police municipale et Samu permet aux soldats du feu et de la vie d’évacuer et sauver tous les sinistrés. Mais un point particulier pouvait être amélioré dans la gestion des victimes une fois celles-ci mises à l’abri puisque très peu de personnels sur place étaient formés au Système d’information numérique standardisé (Sinus). C’est dans ce cadre que le lieutenant Clément Hessel, chef de bureau Suivi et développement des applicatifs, a pris le temps de redétailler toute la procédure autour de cet outil aujourd’hui indispensable dans le recensement et le suivi des victimes.
Autre intervention passée au crible : celle du 19 octobre 2023, à Martigues. Les Pompiers13 sont appelés pour venir secourir un homme retrouvé grièvement blessé par balles dans le parking d’une résidence. La victime succombera quelques heures plus tard de ses blessures et l’auteur des tirs, dans un premier temps retranché chez lui, sera interpellé par le Raid après avoir tenté de se suicider. Un drame qui survient dans un contexte national pesant, quelques jours après l’attaque au couteau mortelle d’un professeur à Arras. De quoi justifier l’emploi de nombreux moyens, dont le Groupe d’extraction (Grex) présenté par le capitaine Maxence Raymond, chef du centre d’incendie et de secours de Saint-Martin-de-Crau, l’un des trois CIS du 13 spécialisés en la matière avec Châteauneuf-les-Martigues et Gardanne.
Une démarche d’amélioration continue
Premier maillon des secours en cas d’attentat, le Grex a été introduit dans différents Sdis par une note de la Direction générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises à la suite des attaques au Bataclan du 13 novembre 2015. Les sapeurs-pompiers sont ainsi dotés d’équipements de protection balistique, de matériel de secourisme spécifique pour notamment lutter contre les hémorragies mais aussi de barquettes et de brancards souples spécifiques aux missions d’extraction. Un équipement adapté pour évoluer en zone contrôlée dans le cadre de la mise en place du dispositif sanitaire et sécuritaire d’urgence dans le cadre d’une attaque terroriste. Ce dernier, décortiqué à l’occasion du séminaire par le capitaine Jean-Claude Varini-Gruat, chef du service Préparation opérationnelle, porte le nom de dispositif « Odoma », pour « Ordre départemental opérationnel menace attentat ».
Le séminaire s’est clôturé par une prise de parole du directeur départemental adjoint, le colonel Pierre Bépoix, lequel « a vraiment pris du plaisir » lors de cette séquence, soulignant « le travail entre les officiers de l’état-major aux côtés des collègues des centres de secours et des groupements territoriaux, qui montre bien la complémentarité qui existe dans l’optique d’une meilleure réponse opérationnelle. »
1 : Un immeuble à usage d’habitation dont le plancher bas du logement le plus haut est situé à plus de 28 mètres et à 50 mètres au plus au-dessus du niveau du sol utilement accessible aux engins de secours.